Certains produits font l’objet d’un contrôle quant à leur sortie du territoire français ou européen. Pour les personnes qui procède à l’exportation de ces produits, il est donc essentiel de maîtriser les conditions de fond et les formalités nécessaires à leur sortie du territoire.
Les principaux régimes de contrôle des exportations concernent (i) les matériels de guerre et assimilés, (ii) les biens à double usage et (iii) les déchets.
Exportation de matériels de guerre et transfert de produits liés à la défense
Le régime de contrôle des exportations de matériels de guerre est double selon la destination des marchandises : vers un État membre de l’UE (on parle alors de transfert) ou vers un État tiers à l’UE (on parle alors d’exportation). Bien que les régimes n’ont pas la même base juridique (le premier étant d’origine européenne, et le second étant d’origine nationale), ils partagent beaucoup de points communs.
La liste des produits concernés par le contrôle des exportations et des transferts est indiquée par arrêté ministériel. Cette liste est complétée, pour le contrôle des transferts, par l’article L. 2335-18 du code de la défense. En réalité, la liste des produits concernés est identique.

La notion d’exportation et de transfert renvoie également aux opérations préparatoires. Il s’agit plus précisément de (art. R. 2335-9 et R. 2335-21 du code de la défense) :
- la diffusion en vue de l’obtention de commandes étrangères, d’informations de nature à permettre ou à faciliter la fabrication ou la reproduction de ces matériels ou à en compromettre l’efficacité ;
- la présentation et les essais effectués en vue de l’obtention de commandes étrangères, à l’exception des présentations effectuées en France dans le cadre des salons internationaux ;
- la cession à l’étranger de tous droits de propriété industrielle et de toute documentation relatifs aux matériels ;
- la communication à l’étranger d’études ou des résultats de ces études ou des résultats d’essais, y compris les prototypes, ainsi que des technologies de conception ou de fabrication directement associées à ces matériels ;
- l’acceptation de commandes et la signature de contrats, y compris d’étude et de fabrication, en vue de l’exportation ;
- l’exportation ou le transfert, temporaire ou définitif, de ces matériels à un ou plusieurs destinataires situés en dehors du territoire français.
La licence d’exportation ou de transfert peut prendre plusieurs formes. Il peut ainsi s’agir d’une licence générale, d’une licence globale ou d’une licence individuelle.
La licence générale autorise directement tout exportateur établi en France remplissant certaines conditions définies par l’autorité administrative à expédier ces matériels vers une ou plusieurs catégories de destinataires. L’existence d’une licence générale ne dispose pas l’exportateur d’effectuer une demande auprès de l’administration. Il existe à ce jour une licence générale d’exportation et huit licences générales de transfert :
- LGE (licence générale d’exportation) FR 201 : à destination des forces armées françaises situées hors de l’UE, et dans le but exclusif d’une utilisation par celles-ci ;
- LGT (licence générale de transfert) FR 101 : à destination des forces armées d’un Etat membre de l’UE ou d’un pouvoir adjudicateur dans le domaine de la défense, dans un but exclusif d’utilisation par ces forces armées ;
- LGT FR 102 : à destination d’une entreprise certifiée d’un Etat membre de l’UE (les fournisseurs doivent impérativement vérifier avant chaque livraison que leurs destinataires sont titulaires d’un certificat valide) ;
- LGT FR 103 : à des fins d’exposition et de démonstration lors de salons internationaux se déroulant sur le territoire d’un Etat membre de l’UE pour une durée maximale de 12 mois à compter de la date de transfert ;
- LGT FR 104 : à des fins de démonstration et d’évaluation auprès des forces armées d’un Etat membre de l’UE ou d’un pouvoir adjudicateur dans le domaine de la défense pour une durée maximale de 12 mois à compter de la date du transfert ;
- LGT FR 105 : à des fins de démonstration et d’évaluation au profit d’une entreprise d’un Etat membre de l’UE, pour une durée maximale de 12 mois à compter de la date du transfert ;
- LGT FR 106 : à destination de la police, des douanes, des gardes-frontières et des gardes-côtes d’un Etat membre de l’UE dans un but exclusif d’utilisation par ces destinataires ;
- LGT FR 107 : en retour à l’expéditeur initial et vers l’Etat membre de provenance des produits ayant été transférés temporairement en France pour démonstration, essai, présentation, exposition dans des salons ou dans des musées, réalisation d’œuvres culturelles, notamment cinématographiques, ou participation à des commémorations historiques ou à des manifestations culturelles ou éducatives ;
- LGT FR 108 : à destination des forces armées françaises situées dans un autre Etat membre de l’UE, et dans le but exclusif d’une utilisation par celles-ci.
La licence globale autorise, à sa demande, un exportateur à expédier des matériels spécifiques à un ou plusieurs destinataires identifiés, pour une durée déterminée, sans limite de quantité ni de montant. La licence individuelle autorise, à sa demande, un exportateur à expédier, en une ou plusieurs fois, un ou plusieurs matériels à un destinataire.
Il existe en outre un certain nombre de cas exemptés de licence d’exportation ou de transfert. Ces différentes hypothèses ont été prévues par arrêté.
Les licences doivent être demandées au ministre de la défense, sur internet via le système SIGALE, ou via un formulaire Cerfa.
La licence peut être assortie de conditions (ex.: limitation du type de matériel ou de ses performances, de sa destination, de son utilisation finale). Une fois la licence obtenue, l’exportateur doit établir un registre des exportations ou des transferts.
Biens à double usage
Les biens à double usage sont les biens pouvant avoir un usage aussi bien civil que militaire. A ce titre, leur exportation en dehors de l’Union européenne fait l’objet d’un contrôle, fixé par le Règlement européen n° 428/2009 du 5 mai 2009.
Les biens concernés sont de trois types :
- les biens listés à l’annexe I du Règlement ;
- les biens non listés à l’annexe I, mais identifiés par l’Etat de l’exportateur comme devant faire l’objet d’un contrôle ; en France, il s’agit (i) des hélicoptères et leurs pièces détachées et (ii) des gaz lacrymogènes et agents antiémeute ;
- les biens non listés à l’annexe I, mais destinés à un pays faisant l’objet de mesures d’embargo sur les armes de la part de l’Union européenne, de l’OSCE ou du Conseil de sécurité de l’ONU ou si les autorités compétentes de l’Etat membre ont informé l’exportateur que les biens peuvent être destinés à une utilisation finale militaire ;

- les biens non listés à l’annexe I, mais susceptibles (i) de contribuer à la prolifération des armes chimiques, biologiques ou nucléaires ou (ii) d’être utilisés comme pièces ou composants de produits militaires ; dans ce dernier cas, l’exportateur est tenu d’en informer l’administration qui décidera de soumettre ou non les produits à la procédure de contrôle des exportations.
Enfin, les services de courtage de biens à double usage sont également soumis à autorisation.
Comme en matière d’exportation de matériel de guerre, les licences d’exportation sont de plusieurs types : autorisations générales européennes, licences générales nationales, licences globales et licences individuelles. L’existence d’une autorisation ou d’une licence générale ne dispose pas l’exportateur d’effectuer une demande auprès de l’administration.
Il existe à ce jour six autorisations générales européennes :
- Autorisation EU001 (exportations vers l’Australie, le Canada, les États-Unis d’Amérique, le Japon, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et la Suisse, y compris le Liechtenstein) ;
- Autorisation EU002 (exportations de certains biens à double usage vers certaines destinations) ;
- Autorisation EU003 (réparation/remplacement) ;
- Autorisation EU004 (exportation temporaire pour exposition ou foire) ;
- Autorisation EU005 (télécommunications) ;
- Autorisation EU006 (substances chimiques).
Il existe également 8 licences générales françaises :
- Licence générale “faible valeur” portant sur les certaines biens pour une valeur maximum de 5.000 euros ;
- Licence générale “matériel aéronautique” portant sur des biens pour la réparation d’aéronefs civils ;
- Licence générale “biens à double usage pour forces armées françaises” ;
- Licence générale “Salons et Expositions” portant sur des biens importés ou transférés au sein de l’UE pour la tenu de salons et d’exposition sous le régime de l’admission temporaire ;
- Licence générale “biens industriels” pour l’exportation de biens industriels relevant du contrôle stratégique communautaire ;
- Licence générale “produits chimiques” portant sur des biens chimiques ;
- Licences générales “produits biologiques” portant sur certains éléments génétiques et OGM ;
- Licence générale “graphite” portant sur le graphite de qualité nucléaire.
Les licences doivent être demandées au service des biens à double usage, rattaché au Ministère de l’économie, via un formulaire Cerfa ou via la plateforme EGIDE.
Déchets
L’exportation (hors UE) et le transfert (intra-UE) de déchets est également réglementé, par le Règlement n°1013/2006 du 14 juin 2006.
Il convient de distinguer deux types de déchets : (i) les déchets destinés à être éliminés et (ii) les déchets destinés à être recyclés. Il convient en outre de distinguer entre le pays destinataire, selon qu’il s’agit d’un pays membre de l’UE, un pays membre de l’AELE et un pays non membre de l’AELE.
De manière générale, l’exportation de déchets vers l’Antarctique est interdite.
Transfert de déchets
Procédure de notification et de consentement écrit préalable
Le transfert de déchets est soumis à une procédure de notification et de consentement écrit préalable pour les transferts suivants :

transfert de déchets destinés à être éliminés ;
transfert de déchets destinés à être valorisés, mais seulement pour certains types de déchets.
Cette procédure prévoit une notification à l’autorité compétente du pays d’expédition. Cette dernière transmet cette notification à l’autorité compétente du pays destinataire, laquelle peut autoriser, autoriser sous condition ou s’opposer au transfert. En France, l’autorité compétente est le Ministre chargé de l’environnement. Les motifs susceptibles de justifier une autorisation sous condition ou une opposition sont limitativement énumérés aux articles 11 et 12 du Règlement.
En outre, tout transfert doit être effectué dans le cadre d’un contrat entre le notifiant (expéditeur) et le destinataire en ce qui concerne la valorisation ou l’élimination des déchets notifiés. Une garantie financière doit également être souscrite par le notifiant.
Procédure d’information
Une procédure d’information est également prévue pour les transferts de déchets supérieurs à 20 kg pour:
- les déchets figurant aux annexes III et IIIB ;
- les mélanges, pour lesquels il n’existe pas de rubrique propre dans l’annexe III, d’au moins deux déchets énumérés à l’annexe III, à condition que la composition de ces mélanges ne compromette pas leur valorisation dans le respect de l’environnement, et à condition que ces mélanges figurent à l’annexe III A.
Les déchets doivent alors être accompagnés d’un document d’expédition.
Exigences générales
De manière générale, que ce soit dans le cadre de la procédure de notification ou la procédure d’information, la personne concernée doit être en capacité de reprendre les déchets lorsque les conditions de leur transfert ne sont pas respectées.
En outre, le mélange de déchets est interdit pendant le transfert et jusqu’à la réception des déchets dans une installation de valorisation ou d’élimination.
Enfin, tous les documents relatifs à un transfert doivent être conservés pendant au moins trois ans.
Exportation de déchets destinés à être éliminés
L’exportation de déchets destinés à être éliminés à destination d’un pays ne faisant pas partie de l’AELE est interdite, de même que vers les pays ou territoires d’outre-mer.
Au contraire, l’exportation déchets destinés à être éliminés à destination d’un pays membre de l’AELE partie à la convention de Bâle est autorisé, sauf si (i) le pays en question interdit l’importation de ces déchets ou (ii) si l’autorité compétente d’expédition a des raisons de croire que les déchets ne seront pas gérés d’une manière écologiquement rationnelle.
Lorsque l’exportation n’est pas interdite, la procédure est identique à la procédure de notification et d’autorisation préalable décrite ci-dessus en matière de transfert.
L’exportation peut cependant être autorisée si (i) le pays destinataire est partie à la convention de Bâle (convention du 22 mars 1989 sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination)
Exportation de déchets destinés à être valorisés
Pour les déchets destinés à être valorisés, il convient de distinguer selon le pays de destination, selon qu’il s’agit d’un Etat membre de l’OCDE ou non.
Vers les pays de l’OCDE, l’exportation de certains déchets suit la procédure de notification et de consentement préalable décrite plus haut.
Vers les pays non membres de l’OCDE ainsi que les pays et territoires d’outre-mer, l’exportation est interdite pour les déchets suivants :
- les déchets dangereux figurant à l’annexe V ;
- les déchets dangereux pour lesquels il n’existe pas de rubrique propre dans l’annexe V ;
- les mélanges de déchets dangereux et les mélanges de déchets dangereux avec des déchets non dangereux pour lesquels il n’existe pas de rubrique propre dans l’annexe V ;
- les déchets que le pays de destination a notifiés comme étant dangereux conformément à l’article 3 de la convention de Bâle ;
- les déchets dont l’importation a été interdite par le pays de destination ; et
- les déchets dont l’autorité compétente d’expédition a des raisons de croire qu’ils ne seront pas gérés d’une manière écologiquement rationnelle, telle que visée à l’article 49, dans le pays de destination concerné.
En ce qui concerne les autres déchets (annexes III ou IIIA), la procédure varie entre chaque pays. La situation pour chaque pays est fixée par l’Annexe du Règlement n° 1418/2007 du 29 novembre 2007.